lundi 22 août 2011

Avant le départ...

Commençons par le commencement. Ou plutôt, commençons avant le commencement. Comme il y a le chauffage et le préchauffage, l’emballage et le préemballage, la méditation et la préméditation, il y a le départ et le pré-départ. En gros, préparez-vous à un article en préfabriqué.


Captain Obvious, partenaire officiel de ce blog


Ca faisait un petit moment que je comptais partir en année d’échange au Japon. Dès mon entrée à Sciences-Po en fait, quand je regardais fébrilement la liste des universités partenaires. J’hésitais un peu entre la Finlande – mon deuxième pays – et le paradis des Pokémons, mais le Pays du Soleil Levant l’a bien vite emporté sur le Pays des Mille Lacs. Après tout, tant qu’à partir, autant partir loin plutôt qu’à son deuxième chez-soi ?

La troisième année me semblait encore loin et comme j’avais d’autres chats à fouetter, je n’ai pas plus creusé les motivations. Bizarrement, j’ai gardé cette nonchalance habituelle jusqu’au milieu de la 2e année où j’ai blindé la lettre de motivation justifiant les vœux à l’étranger d’à peu près autant de bullshit que toutes mes dissertations depuis la 3e. Depuis, l’année abroad s’est rapprochée avec la même rapidité perverse que le Groke pourchassant les voleurs de sa valise.


Le Groke, partenaire officiel de vos angoisses d’enfant depuis 1990


Les motivations. Venons-en à un sujet délicat. Comme à peu près les ¾ des étrangers partant au Japon, je suis incapable d’aligner deux vrais arguments pour ma volonté d’y aller. C’est juste un feeling, une sensation qui me dit « Retourne-y ! ». C’est peut être ce mélange entre modernité et tradition, sérénité zen et activité bouillonnante, sérieux millénaire et WTF complet qui m’attire, couplé à cette image d’un ailleurs lointain. Ca, c’était surtout avant le 11 mars.

Depuis, la question rituelle s’est changée de « Tu vas au Japon ? Ah ouais trop cool, pourquoi ? » à « Tu n’as pas peur des radiations ? », « Je n’irai pas si j’étais toi », ou encore « Fais gaffe hein, les radiations peuvent changer ton ADN, tu vas devenir un mutant à cinq bras et tes enfants seront des aliens – si tu réussis à en avoir ! ». Ma réponse est généralement la suivante :


L’expérience personnelle en vaut les risques, qui ne font que s’ajouter aux divers séismes, typhons et tsunami qui vont me menacer 11 mois durant. Fukushima, c’est de la gnognotte face à la toute-puissaaaaance de Dame Nature dans un pays qui n’est franchement pas gâté.

Paradoxalement, les évènements qui se succèdent depuis mars dernier m’ont encore plus motivé à partir au Japon. Vivre dans une contrée qui fait face à la pire catastrophe industrielle du XXIe siècle et partager le quotidien des habitants dans une paranoïa de l’Atome ont quelque chose d’excitant, en plus de me préparer à l’invasion de zombies au 22 décembre 2012. Et d’un autre côté, le climat incertain a pu éloigner tous les Chinois et Américains qui seraient venus au Japon par défaut, en mode « Il n’y avait plus de place à Louvain, alors j’ai choisi Tokyo… » (Marie-Victoire, si tu me lis, big up grosse). C’est cool de sentir que les gens sont motivés d’être là et qu’ils sont à fond dans le truc, même s’ils vont choper un cancer dans 50 ans – c’est mon côté hipster qui doit faire ça.

Mais on n’en est pas encore là. On n’est même pas encore parti, contrairement à d’autres qui coulent déjà des jours heureux en Inde, Australie, US ou Afrique du Sud. C’est peut-être ça le plus frustrant, d’attendre le départ pendant que d’autres ont déjà leur existence de fraîshouze à l’étranger. Encore qu’il y a plusieurs étapes dans ce genre de situation, à partir des résultats de la DAIE en janvier :

La non-attente : annonce des résultats
« Oh yes, j’ai eu l’université que je voulais ! Bon, on se prend une bière pour fêter ça ? »

L’attente nonchalante : M-8 – M-5
« Ouais je pars, c’est cool et j’ai hâte, mais ce soir y’a Pulp Fiction à la télé. Et puis après, c’est Crit’. »

L’attente administrative : M-5 – M-2
« Ils font quoi ces branleurs, ça fait un mois que j’attends ce fucking certificat pour demander mon visa ! Et pour le logement, ils comptent me faire poireauter encore longtemps ? Et comme par hasard, la DAIE est fermée la moitié de la semaine ! »
Noter que cette étape peut durer jusqu’au jour du départ pour les champions.

La prise de conscience : M-2
C’est le moment où on réalise que tout n’est pas beau et que le monde n’est pas une création de Bisounours.
« Ah ouais en fait, je vais pas voir mes potes pendant un an. Et en plus, les fringues coûtent ultra-cher au Japon, je vais devoir prendre un peu plus que 3 T-shirts et deux jeans. D’ailleurs, ils connaissent la pointure 47 à Tokyo ? Comme je me suis fait refuser mes bourses, comment je vais financer mon séjour et tous les voyages de la muerte que j’ai planifiés ? »

Les au-revoir dans l’attente : M-2 et après
Ceux-ci se déclinent en plusieurs variations :
  • Mélodramatique : « Oh j’ai passé de très bons moments avec toi, j’espère que tout va bien se passer et qu’on ne s’oubliera pas après cette très loooongue séparation. Il faut absolument qu’on se voit au cours de l’année, à Noël ou pendant tes vacances ! Comment on va faire pour se contacter ? » – « Keep cool, on se revoit dans deux jours. »
  • Prévoyant : « Tu vas revenir, hein ? Tu me fais pas le coup de te trouver une Japonaise et de rester faire ton master là-bas ! »
  • Sciences-pote : « Bonne 3A, profite à donf ! »
  • Sobre : « A la prochaine, mec ! »
  • Branché : « On se Skype et on fait une méga-conversation entre l’Asie, l’Afrique et les Etats-Unis dès ton arrivée, OK ? »
  • Fraîshouze : « Tu penseras à moi pour monter ta liste BDE ? »
  • Ex-1A : « A dans… deux ans ? »

La préparation mentale : M-1 et après
*Regard vide, bouche ouverte devant un ventilateur électrique*

Il paraît qu’il y a aussi la période de flip intense, mais je n’en suis pas encore là.



Voilà à quoi devrait ressembler mon année. CHALLENGE ACCEPTED !


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